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Par Bamby Diagne

L’architecture du Grand Zimbabwe

Classé monument national, Le Grand Zimbabwe est une mystérieuse cité bantoue dont les ruines témoignent de l’existence d’une ancienne civilisation incroyablement évoluée et aujourd’hui disparue, les Gokomere. Situé dans le sud du pays, on y découvre de gigantesques remparts en granit, des monuments en pierres taillées et des statues, tous permettant d’en savoir plus sur la culture bantoue au Moyen-Âge.

L'architecture du Grand Zimbabwe

Pour comprendre les multiples hypothèses – pour le moins farfelues lorsqu’on les observe sous le prisme de notre époque – concernant les origines des ruines du Grand Zimbabwe, il est important de se replacer sous le prisme occidental de l’époque.

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Lorsque, le 5 septembre 1871, l’explorateur allemand Karl Mauch découvre en plein cœur de l’Afrique australe une vaste enceinte en pierre et des murailles en ruines, tout ce que savait l’Europe de ce monument, c’était le peu que les portugais avaient rapporté durant le XVIème et le XVIIe siècle. 

En 1522, Joao de Barros, historien, linguiste et écrivain portugais avait en effet rapporté l’existence d’une forteresse faite de pierres de taille superbe et qui semble ne pas avoir de mortier les reliant. Dans l’enceinte se trouvait une grande tour.

Barros avait admis qu’aucun portugais n’avait vu l’édifice mais qu’ils se basaient sur les informations fournies par les Maures. Il a néanmoins conclu qu’il s’agissait d’Aksoum, l’une des villes de la Reine de Saba. Suivant ce cheminement, ses successeurs écrivains portugais étaient convaincus qu’il s’agissait de l’ophir biblique dont la reine de Saba avait obtenu l’or pour le temple de Salomon

Après une excursion entre 1868 et1869 qui se solda par un échec, c’est finalement le 5 septembre 1871 que Carl Mauch atteint enfin la cité mythique du Grand Zimbabwe. Il commença à collecter des données pour prouver les diverses hypothèses concernant l’édifice. Ce qui attira d’abord son oeil était une poutre en bois à l’entrée de la Grande Enceinte. Et donc, 6 mois plus tard il entreprit “une expédition de vol de bois” et se mit à extraire des échardes de bois des diverses poutres qu’il trouva dans la cité. Le bois, très résistant au feu, était peu odorant, mais lorsqu’il était brûlé, il en libérait une très forte odeur. Enfin, ces propriétés assez particulières ont renforcé l’hypothèse selon laquelle il s’agit de bois de cèdre qui ne peut provenir d’un autre pays que le Liban

En outre, seul les Phéniciens auraient pu en apporter jusque là-bas. Le roi Salomon, usait de bois de cèdre pour la construction de son temple. En ajoutant ces éléments aux hypothèses fondées par d’autres écrivains et à celles du révérend allemand Merensky qu’il avait rencontré à son arrivée, Carl Mauch se hâta vers la conclusion que cette enceinte avait bien été construite sous les ordres de la Reine de Saba.

Tout ce qu’il manquait pour emballer le dossier était des preuves orales à l’appui. Celles-ci ont été fournies par un médium qui était l’hôte de Carl Mauch. Dans leur narration, les informateurs ont évoqué le sacrifice de bétail à un Dieu Suprême et que quelqu’un était désigné comme chef de ces cérémonies. Le chaînon manquant était trouvé. Les locaux avaient un “Grand-Prêtre” et imitait le festival des Juifs de Salomon. 

Il écrit la phrase suivante :

“À en juger par les réponses à mes questions, il ne fait désormais aucun doute que la religion juive, comme elle exista durant le temps de Salomon, a été transplantée ici dans toute son essence par la Reine de Saba.”

La Destruction des Ruines

Ce fût la théorie de l’Ophir qui poussa La colonne des pionniers, une troupe rassemblée en 1890 par Cecil Rhodes, à coloniser le Zimbabwe. La théorie fut utilisée pour justifier l’oppression. Elle était basée sur la pensée de l’infériorité mentale des africains. 

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Alors que le Zimbabwe devenait de plus en plus, un puissant symbole du mouvement nationaliste Africain, le gouvernement des colons, patriculièrement entre 1965 & 1979, a cherché à effacer tout travail pré-historiens, concernant le Grand Zimbabwe. L’archéologue, Peter Garlake, a été forcé de quitter le pays après avoir publié un livre qui attribuait la construction du Grand Zimbabwe aux africains. 

À cause de l’impact qu’ont eu les trouvailles de Mauch sur le sujet, il est intéressant d’analyser les données selon lesquelles il a basé ses conclusions. 

La première étant l’hypothèse de l’Arche d’alliance. 

Il a été apporté à Mauch qu’il y avait sur les lieux un coffre à 4 pattes avec une substance jaune à l’intérieur étant, selon ses descriptions une copie de l’arche d’alliance décrite dans la Bible comme le coffre contenant les Tables de Loi données à Moïse sur le Mont Sinaï.Mauch n’a d’ailleurs jamais réussi à le localiser. Inutile de dire que cette poterie connue sous le nom Pfuko Yeku Vanje n’a aucune relation avec le coffre biblique. 

La seconde hypothèse était celle du Grand-Prêtre. 

Ce prétendu Grand Prêtre n’était autre que Tenga du clan Nemanwa. Le Groupe Manwa a migré du Mutoko, dans l’actuel Nord-Est du Zimbabwe pour s’installer dans le Grand Zimbabwe lors du XVIIe siècle. Ce qui a été rapporté à Mauch indique que les narrateurs indigènes faisaient référence à une cérémonie Bira traditionnelle pour apporter la pluie et pas une cérémonie juive. 

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Les Shona qui constituaient 80% de la population du Zimbabwe vénéraient un Dieu Suprême, dont l’approche est drastiquement différente de celle des religions révélées. Ce Dieu suprême n’était sollicité que par l’intermédiaire des ancêtres et dans le cas apporté ici c’est précisément ce que faisait le clan Nemanwa.

La troisième hypothèse, celle qu’on a évoquée en premier, est celle du bois de Cèdre. 

La description de Mauch corresponds à celle du Tamboti surnommé le Santal Africain.

Aucun texte alternatif pour cette imageSon bois était traditionnellement utilisé pour éloigner les mauvais esprits. Son usage à l’entrée de la ville paraît donc très clair.  L’arbre était indigène et son usage local. Les morceaux du bois de Tamboti récupérés dans la Grande Enceinte ont été datés au carbone 14. Les résultats plaçant l’ancienneté des arbres autour de 1305 à 1348 ont démolit la théorie de l’Ophir pré-Chrétien. Les ruines datent donc de la période médiévale.

Entre 1890 et 1910, des chasseurs de trésors, dont certains ont formé la société d’exploration des ruines anciennes, ont littéralement détruit le lieu sous couvert de recherches archéologiques. Le dossier de Mauch permet de reconstruire une image de ce que pouvaient être les vestiges de cette ville avant son pillage. Si on peut dire quelque chose de Karl Mauchc’est qu’il a vécu selon ses valeurs “J’ai à coeur les ruines qui reposent sur cette terre.” Il n’a jamais été à la recherche de trésor. 

 

Le plus déroutant, sont ses dernières opinions sur le sujet. En 1873, il dit : 

« Depuis mes dernières nouvelles sur le Zimbabwe en septembre 1871, mes vues sur les ruines ont considérablement changées. Cela fait suite à des discussions avec des personnes plus âgées, et donc plus détachées. Une explication s’est imposée à moi, que je n’ose pas rendre publique, bien que je sois convaincu de sa justesse. »

La Reconnaissance de l’Origine Africaine de l’architecture du Grand Zimbabwe

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En 1903, le monde scientifique s’inquiète de l’évolution de la situation au Grand Zimbabwe, où Richard Hall, censé être le conservateur, ravage le Monument.

En 1905, la British Association for the Advancement of Science dépêcha Randal MacIver, un archéologue qui, après avoir fouillé la Grande enceinte, la vallée et le complexe des collines, déclara : 

« Les habitations et les objets trouvés partout dans les enceintes de pierre sont incontestablement africains dans tous leurs détails et appartiennent à une période fixée par les importations étrangères comme étant en général médiévale ». 

Il a été suivi par Gertrude Caton-Thompson dont l’étude plus approfondie du monument l’a amenée à conclure :

« L’examen des preuves existantes recueillies de toutes parts, ne peut toujours pas produire un seul élément qui ne soit pas en accord avec l’affirmation d’une origine bantoue et d’une date médiévale. Par conséquent, les ruines sont, à mon avis, indigènes dans le plein sens du terme ».

Ses conclusions ont constitué le mot de la fin. Les fouilles ultérieures n’ont plus porté sur l’identité des bâtisseurs, mais sur le développement et la disparition du Grand Zimbabwe, et c’est là-dessus que nous devons concentrer notre attention. « Aucun archéologue ou historien professionnel compétent n’a jamais mis en doute les origines africaines locales du Grand Zimbabwe. Les recherches menées depuis 80 ans l’ont confirmé de manière concluante à maintes reprises », a écrit Peter Garlake, une autorité en la matière.

Les Ruines.

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Étendues sur environ 7km2, les ruines de la cité de Grand Zimbabwe se déploient entre les fleuves Zambèze et Limpopo, dans une zone de savanes, sur un haut plateau granitique, en Afrique australe. Le site s’étalait à la fois sur le Malawi, le Zimbabwe, le Mozambique et la Zambie.

Elles comportent d’imposants remparts de granit et de nombreuses constructions en pierres taillées, assemblées sans mortier. Des statues de forme phallique ou représentant des oiseaux laissent deviner l’habileté des artistes de ce royaume médiéval d’Afrique australe. Ce site constitue un témoignage unique de la culture bantoue au Moyen-Âge.

 

Port de sofala
Zimbabwe signifierait « cour du roi » en shona. L’ancienne cité de Grand Zimbabwe ne comporte aucune inscription. La ville a connu son apogée entre le XIe et le XVe siècle. Sa population a atteint autour 18 000 habitants à son apogée.Elle commerçait avec l’Extrême-Orient par l’intermédiaire des ports de la côte orientale de l’Afrique. L’ivoire ainsi que les importants gisements d’or qui entourent la ville fournissaient aux habitants des monnaies d’échange pour commercer avec les Arabes installés dans les ports de Kiloa ou Sofala.

Les fouilles archéologiques ont mis à jour des perles en provenance d’Orient, des objets en cuivre et des bijoux en or. Elles donnent à penser que les souverains du Grand Zimbabwe étaient amateurs de perles de verre indiennes et de soieries chinoises. 

À l’époque, les échanges de Grand Zimbabwe avec le monde extérieur allaient de bon train. Il arrivait du Moyen et de l’Extrême-Orient, via le port de Sofala de l’actuel Mozambique, qui faisait partie de l’empire du Muene Mutapa, de grandes quantités de perles, de tissus et d’autres articles.

Muene Mutapa Monomotapa

Le Muene Mutapa s’étendait sur des territoires appartenant aujourd’hui à 4 États différents : le Zimbabwe, la Zambie, le Mozambique et le Malawi.

Toujours est il que Richard Hall, qui rappelons le, était l’un des acteurs de la destruction des ruines, a découvert tellement de ces richesses dans une de ces trouvailles dans la Vallée qu’il en conclut qu’il s’agissait là d’une station de commerce médiévale arabe tandis que Garlake l’a décrit comme la trésorerie du Roi. 

Conclusion

En 1980, lorsque la majorité noire a pris le pouvoir à Salisbury (aujourd’hui Harare), le pays a abandonné son nom,formé à partir de celui du Britannique Cecil John Rhodes,pour prendre celui de Zimbabwe, en souvenir du Grand Zimbabwe

Grand Zimbabwe

Depuis sa découverte à la fin du XIXe siècle jusqu’à aujourd’hui, un long chemin a été parcouru pour tenter de comprendre les origines et le statut de la ville. 

Elles sont aujourd’hui protégées et inscrites au patrimoine mondial de l’Unesco.

La visite de Grand Zimbabwe permet de plonger dans l’histoire de l’Afrique et de découvrir à quel point on en connaît si peu à ce sujet. Disséminées au cœur d’un parc national de 800 hectares, les ruines dévoilent des murs comme dressés au hasard, mais qui devaient autrefois abriter des habitations, des temples et des lieux de rassemblement et de vie…

 

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