Le repassage des seins est une souffrance infligée aux jeunes principalement Camerounaises , Togolaises et Guinéennes. Ici, lorsque l’on parle du repassage des seins, c’est au sens propre du terme. Au même titre que l’excision , c’est une mutilation du corps de la femme . 

Il s’agit de placer une source de chaleur extrême par le biais d’une grosse pierre ou un morceau de bois , directement sur la poitrine de la jeune fille pendant plusieurs secondes. On retrouve aussi l’utilisation de « serre-seins ». Les principales victimes de cette technique affreusement douloureuse sont de très jeunes filles pré pubères.

Le but étant de stopper le développement de leur poitrine. Ramollir les seins, les rendre tombants et repoussants. L’acte est justifié par l’envie de protéger. Éviter les regards masculins posés sur elles, l’attirance des hommes, les viols ou les relations hors mariages. En d’autres termes, c’est un bien pour elle. Une nouvelle fois, on assiste à une idéologie qui fait de la féminité un problème, réduisant la femme à un objet de désir et l’homme à un être incapable de se contrôler face à des attributs féminins. 

À l’heure actuelle, il n’existe encore aucun chiffre sur ce phénomène en France. Néanmoins, il est fort probable que des jeunes filles aient été victimes du « repassage des seins » en France tout comme certaines y ont été excisées. 

Les conséquences du repassage des seins 

Au-delà de la douleur ressentie sous l’effet de la chaleur. C’est une violation de l’intimité qui laisse des traces . Les conséquences sont certainement psychologiques mais aussi physiques. 

Dans certains des cas , la poitrine ne se développera pas du tout . Elle est complètement stoppée dans sa croissance. Dans d’autres cas, la poitrine pousse, mais très mal : elle n’a aucun maintien, la peau est très élastique et des cicatrices apparaissent. Ces conséquences sont souvent l’origine d’un réel complexe pour les femmes concernées. Le sentiment complexant de ne pas être comme les autres , de n’avoir que 20 ans mais la poitrine d’une femme âgée . 

Pire encore , on recense un nombre important de cancer du sein chez les femmes ayant subi cette pratique . 

D’après une étude menée en 2013 par l’Institut pour la Recherche, le Développement Socioéconomique et la Communication (IRESCO) : 17% des cas de kystes ou abcès sont la conséquence du repassage des seins et 2% des femmes ont subi l’ablation d’un sein . 89,32% des femmes se plaignent ensuite tout le reste de leur vie , de douleurs aux seins . Une fois devenues mères , bon nombre d’entre elles se trouvent dans l’impossibilité d’allaiter leur enfant . 

“ J’ai vu une mère avec une brûlure au second degré aux mains, des jeunes filles aux glandes mammaires complètement détruites et un cas de cancer. Même si je ne peux pas démontrer que c’est le repassage des seins qui a causé le cancer ou s’il a juste permis d’exacerber la tumeur” – gynécologue – reportage cnn 

Un héritage qui se transmet 

Le repassage des seins est une tradition profondément ancrée. Bien souvent , les jeunes filles qui l’ont elle-même subi , le reproduiront ensuite sur leur propres filles toujours en pensant agir pour leur bien.

Cependant, de plus en plus de jeunes femmes témoignent et tentent de prévenir pour mettre un terme à ce fléau. Certaines associations se mobilisent et les aident à s’exprimer. Georgette Arrey Taku est la secrétaire exécutive de Renata, le Réseau national des associations de tantines, qui s’occupe de l’éducation sexuelle des Camerounaises. Une organisation qui travaille en collaboration avec les pouvoirs publics camerounais. 

Elle s’exprime :

« Beaucoup de femmes s’inquiètent quand la puberté de leur fille arrive, vers 8 ou 9 ans. Elles considèrent que c’est trop tôt et donc se mettent en tête que la fille va attirer les garçons et risque une grossesse précoce. Des jeunes filles se font masser jusqu’à 14 ou 16 ans. En faisant disparaître leurs seins, les mères imaginent ainsi contrôler leur effet sur les hommes et donc leur sexualité. Ceci est évidemment une illusion, nous accueillons régulièrement dans notre association des filles-mères qui ont pourtant eu les seins massés. C’est pourquoi nous tentons de convaincre les parents que seul le dialogue peut permettre une éducation sexuelle efficace. » .. « Notre travail, c’est de faire comprendre aux mères que le massage des seins cause bien plus de tort à la jeune fille qu’une puberté normale. Nous sommes beaucoup sur le terrain, à la sortie des églises, dans les réunions traditionnelles de mères de famille. Nous faisons témoigner celles qui ont pris conscience du mal qu’elles avaient fait. Mais faire changer les mentalités prend du temps, d’autant qu’il n’existe pas de loi interdisant cette pratique. » 

Le chemin paraît encore long et très peu de gens sont sensibilisés à ce sujet, bien moins médiatisé que l’excision, mais tout autant dévastateur.